Les deux hommes ont d’abord été envoyés ensemble à la maison de force de Tsiafahy samedi dans la mi-journée. Pourtant, à peine quelques heures plus tard, Rijasoa a été transféré vers la prison d’Imerintsiatosika. Ce changement rapide ne doit rien au hasard. D’après nos sources, il s’agit d’une mesure de précaution destinée à éviter que les deux hommes puissent communiquer, coordonner leurs versions ou s’influencer.
Cette méthode n’est pas nouvelle dans les dossiers sensibles. On se souvient encore de l’affaire d’empoisonnement d’Ambohimalaza où Fenohasina, celle dont on avait fêté l’anniversaire, a été séparée des autres accusés pour protéger l’enquête. L’idée est que, plus les suspects sont éloignés les uns des autres, plus il est difficile pour eux de s’entendre sur un discours commun. Cela doit permettre à la justice de recueillir des témoignages plus fiables et d’avancer plus sereinement.
La répartition des autres inculpés dans différentes prisons s’inscrit dans cette même logique. Neuf personnes ont été dirigées vers la prison d’Avaradrano à Talata Volonondry. Une dame âgée, également inculpée, a été envoyée à la maison centrale de Manjakandriana. Le reste a été placé à la maison centrale d’Antanimora. Cette dispersion montre la volonté des autorités de garder le contrôle sur un dossier qui implique aussi bien des hauts responsables de l’Aviation civile de Madagascar (ACM), que des étrangers et des sociétés.
Faut-il en effet rappeler que cinq sociétés sont citées dans la procédure. Nos sources révèlent qu’il s’agit de Udaan Aviation, Global Security, Madagascar Global Security, Madagold Ion et Fashion Paradise. Selon les informations disponibles sur le site de l’EDBM, les noms de Singh et de Rijasoa figurent à différents niveaux dans la création ou la gestion de ces structures.
Cette affaire a commencé après la découverte de faux documents concernant l’immatriculation provisoire de cinq avions Boeing 777-212. Ces avions avaient transité par le Cambodge avant d’arriver en Iran, un pays sous sanctions internationales. Normalement, les certificats d’immatriculation et de navigabilité délivrés à Madagascar n’étaient valables que trois mois, de janvier à avril 2025. Mais les documents avaient été falsifiés pour repousser leur validité jusqu’en juillet, ce qui a permis à ces appareils de voler avec des papiers frauduleux.
Devant la gravité des faits, le Pôle anti-corruption (PAC) a pris le dossier en main. Les accusations sont lourdes puisque l’on parle de corruption, abus de fonction, blanchiment d’argent, concussion, usurpation de titres et même atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat. La détention provisoire s’imposait pour éviter toute fuite, destruction de preuves ou pression sur des témoins.
Parmi les inculpés, certains ont commencé à parler. L’un des cinq ressortissants indiens mis en cause a déjà avoué avoir participé à la falsification. Ses déclarations pourraient peser lourd dans la suite de l’enquête.
Recueillis par L.A.